Coups de coeur

La collégiale Saint Vulfran d’Abbeville, chef-d’œuvre du gothique flamboyant

collegiale saint vulfran

La Collégiale Saint Vulfran est un chef-d’œuvre de l’art gothique flamboyant picard. Érigée pour protéger la ville contre la peste et accueillir de « saintes reliques », elle vit la pose de sa première pierre en 1488, mais à cause du terrain marécageux sur lequel elle était construite, des guerres de religions et de manque de financement, elle ne fut (presque) achevée qu’en 1663. C’est, à n’en pas douter, le plus remarquable monument d’Abbeville. 

La Picardie maritime bénéficie de magnifiques ouvrages d’art gothique flamboyant : l’abbatiale de Saint-Riquier, la chapelle du Saint-Esprit de Rue et l’église collégiale Saint Vulfran d’Abbeville.

Classée monument historique dès 1840, c’est-à-dire sur la toute première liste des « monuments historiques protégés » créée par Prosper Mérimée, l’imposante collégiale Saint Vulfran nous rappelle qu’Abbeville, au Moyen Âge, était un port maritime majeur et une ville florissante.

collégiale saint vulfran d'abbeville

L’histoire de la collégiale Saint Vulfran

À l’origine, une simple église paroissiale se trouvait à l’emplacement de la collégiale, mais en 1508, le comte Gui 1er de Ponthieu y rapporta des reliques de Saint « Wulfram » (ancien officier de Dagobert et Clovis devenu archevêque de Sens, qui convertit à la chrétienté des peuples du nord de l’Europe).
Comme le comte fonda également une communauté de clercs (un « collège » de « chanoines »), l’église prit le nom de collégiale Saint Vulfran, avec la volonté d’être « la plus belle église du Ponthieu ».

Mais la collégiale que l’on peut voir de nos jours a été édifiée à partir de 1488 à proximité d’un bras de la Somme, sur un terrain marécageux. La construction allait s’étaler sur deux siècles pour cause d’instabilité du sol… et de problèmes financiers récurrents.
La collégiale fut érigée dans le but d’accueillir les reliques de Saint Vulfran, mais aussi pour protéger Abbeville d’une épidémie de peste qui sévissait dans la région à la fin du 15e siècle.
La partie ouest de la collégiale fut terminée en 1502, les tours accueillirent les cloches en 1524, la nef et les chapelles furent terminées en 1539, mais les guerres de religion et les invasions espagnoles arrêtèrent le chantier qui ne reprit qu’en 1661 avec l’édification du chœur. Finalement, en 1691, les vitraux furent installés dans les trois verrières supérieures de l’abside.

L’édifice fut restauré dans les années 1860 pour assurer la solidité du bâtiment. Mais au début de la Seconde Guerre mondiale, le 20 mai 1940, la commune d’Abbeville fut bombardée, ce qui provoqua un terrible incendie qui détruisit une grande partie de la ville et de la collégiale. L’édifice fut restauré durant de longues années et ne fut rendu au culte qu’en 1998.

La partie qui semble détruite sur la droite correspond en fait au prolongement de la collégiale qui était prévu à la Renaissance, mais qui, par manque de fonds, n’a jamais été construit.

L’extérieur de la collégiale

La façade de la collégiale, qui s’élève sur trois étages, semble faite de dentelle de pierre. Elle est encadrée par deux tours symétriques de 56 m de hauteur, surmontées de tourelles de guet (une rareté).

collégiale saint vulfran d'abbeville

Les trois portails de la façade sont fermés par de hautes portes sculptées de style Renaissance, dont le magnifique portail central créé par les « huchiers » picards durant la Renaissance. Les huchiers étaient des menuisiers qui meublaient les églises et les demeures, créant notamment des « huches », des grands coffres de bois.

Sur les vantaux en bois du portail principal ont été sculptées des scènes de la vie de la Vierge et des figures d’apôtres.

Plusieurs des sculptures du portail ont été financées par les différentes corporations de la ville, qui ont financé la réalisation des saints patrons qu’elles voulaient représenter.
Au centre, on reconnait ainsi de gauche à droite, saint Vulfran, saint Nicolas (patron des marins et des commerçants), saint Firmin (patron des tonneliers et de la ville d’Amiens) et saint Germain l’Écossais (Germain d’Amiens).

Les sculptures situées au tympan (au-dessus du portail central), représentent la Trinité et des épisodes de la vie du Christ.

Sur le portail nord, on reconnait la légende de saint Eustache (un général romain converti au christianisme avec sa famille).

Sur le portail sud, des statues représentent l’Assomption de la Vierge, ainsi que Sainte Marie de Cléophas et Salomé. Toutes vêtues de somptueux costumes Renaissance, ces trois statues ont été exécutées en 1501 par Pierre Lheureux, elles ont été offertes par la corporation des merciers (commerçants).

collégiale saint vulfran

L’intérieur de la collégiale Saint Vulfran

Lorsque l’on pénètre dans la collégiale, on est surpris par la relative simplicité des lignes, comparées aux sculptures de la façade. Mais l’attention est immédiatement attirée par les superbes retables des chapelles latérales. Puis l’on découvre les créations de l’artiste américain William Einstein : les couleurs vives des vitraux modernes, le chemin de croix et les tableaux.

Dans chacun des bas-côtés se trouvent trois chapelles.

Dans le bas-côté sud (à droite) :

Dans la chapelle Saint-Jean-Baptiste se trouve un retable représentant le baptême de Jésus, en pierre polychrome, dont l’original datait de la Renaissance.
Abimée par le temps, l’œuvre a été refaite en 1849 par les frères Aimé et Louis Duthoit (sculpteurs amiénois médiévalistes qui participèrent également à la restauration de la cathédrale d’Amiens, de la chapelle du Saint-Esprit de Rue et de l’abbatiale de Saint Riquier).

La chapelle Saint-Yves-et-Sainte-Anne possède un autel dédié à sainte Anne dont le retable du 16e siècle est conservé au musée Boucher-de-Perthes d’Abbeville (il est remplacé par une photo…).
Au-dessus du retable se trouvent des statues de saints et, en face, un tableau représentant saint Sébastien, datant du 17e siècle.

La chapelle Saint-Quiriace présente une sculpture d’un Christ descendu de la croix, datant du 18e siècle. Les magnifiques peintures murales de style Art déco, datant de 1931, sont l’œuvre de Victor-Ferdinand Bourgeois, célèbre peintre de l’époque qui a souvent œuvré à Amiens.

On trouve aussi de ce côté de la collégiale d’impressionnants fonts baptismaux en marbre du 18e siècle.

Dans le bas-côté nord (à gauche) :

La chapelle Saint-Louis est typique de la Renaissance. Édifiée en 1492, elle possède un magnifique retable en pierre polychrome représentant la Nativité (il a lui aussi été refait au 19e siècle par les frères Duthoit). Il est surmonté de trois statues représentant le Christ entouré de saint Pierre et de saint Paul.
On peut également admirer dans cette chapelle une statue de Vierge à l’Enfant, en bois peint du 17e siècle.

La chapelle Saints-Anges-et-Saint-Luc présente un retable du 19e siècle, réalisé par les frères Duthoit représentant le Jugement dernier, sculpté en plâtre et placé dans un cadre du 17e siècle.

Les bons sont accueillis par des anges. Les démons précipitent les pêcheurs dans la gueule du Léviathan qui symbolise l’entrée des enfers.

La chapelle possède également un bas-relief du 16e siècle, restauré en 1843, représentant « La femme adultère ».

Dans la chapelle Saint-Firmin se trouve un tableau représentant « Le Christ au mont des Oliviers » œuvre de Herminie Déhérain (une peintre née à Abbeville en 1798, dont on trouve des œuvres à Douai et Versailles). Ce tableau a été donné à la collégiale par le roi Louis-Philippe, en 1837.

Les boiseries du chœur ont disparu lors du bombardement du 20 mai 1940, mais la voûte a été refaite en bois lors de sa restauration.
Les verrières sont garnies de superbes vitraux de William Einstein.

Le maître-autel, orné de scènes sculptées retraçant la vie de saint Vulfran, a été réalisé par les frères Duthoit en 1848. Il a survécu aux bombardements de 1940.

Né aux États-Unis, William Enstein s’est installé en France en 1927, à 20 ans, pour étudier les couleurs du fauvisme et la peinture moderne. Son épouse, native d’Acheux-en-Vimeu, lui a fait découvrir la Picardie, où il s’est fixé en 1966. Les vitraux qu’il a créés pour la basilique Saint Vulfran, en 1962, semblent faits de flammes multicolores et toujours en mouvement.

Sous le vitrail, deux des tableaux peints en 1962 par Einstein pour le chemin de croix de la basilique.

Quand on se retourne vers la façade, on retrouve le gothique flamboyant, les grandes arcades, les feuilles de vigne et la magnifique dentelle de pierre…

La Collégiale Saint-Vulfran est un passage absolument obligatoire lors de tout voyage à Abbeville.

L’été, des visites guidées sont proposées en semaine par l’office du tourisme d’Abbeville, ainsi que l’ascension des tours de la collégiale, qui offrent une vue imprenable sur la ville et les vallées environnantes à 56 mètres de hauteur.

INFORMATIONS PRATIQUES

Adresse : parvis Saint Vulfran 80100 Abbeville

Horaires : La collégiale est ouverte au public tous les dimanches et jours fériés de 14h à 18h. Du lundi au samedi : du 1er avril au 30 septembre de 10h à 18h, du 1er octobre au 31 mars de 14h à 17h.

Tarif : l’entrée est gratuite

Puisque vous êtes dans le coin, promenez-vous au parc de la Bouvaque, un coin de nature à Abbeville.
Vous pouvez aussi pousser jusqu’à Rue pour visiter un autre chef-d’œuvre gothique, la chapelle du Saint-Esprit, vous promener sur la plage le long des cabines de Cayeux-sur-Mer ou passer la journée romantique au Crotoy.

Cet article vous a plu ? Gardez-le ou partagez-le.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.