Week-ends

Une journée romantique au Crotoy

La charmante station balnéaire du Crotoy, au nord de la Baie de Somme, a été l’un des ports de pêche les plus importants de la Manche. Aujourd’hui, elle accueille volontiers les vacanciers et les promeneurs sur sa longue plage de sable fin, la seule du Nord exposée au sud. Les couleurs de la Baie de Somme ont attiré au Crotoy les artistes, peintres et écrivains, qui se sont nourris de ses ambiances lumineuses. Vous allez y passer une journée entre rêverie et émotion.

Depuis juillet 2020, la commune fait partie du “parc naturel régional Baie de Somme – Picardie maritime”, qui s’étend sur 1350 km² de Mers-les-Bains à Fort-Mahon sur le littoral, et jusqu’à Condé-Folie dans les terres. Le Crotoy est posé sur une lande de terre s’avançant sur la mer en bord de la Manche, en face de Saint-Valery-sur-Somme.

La ville du Crotoy

Le Crotoy est une petite ville où les maisons de pêcheurs se mêlent aux demeures de vacances. Il est divisé en deux “parties” : d’un côté le Bourg (l’ancien village originel) qui constitue le centre-ville concentrant les commerces, les hôtels, les services publics, l’église… et de l’autre, les quartiers de villégiatures, qui se sont développés le long de la plage.

Jusqu’au début du 19e siècle, Le Crotoy a été un tranquille petit village de pêcheurs, mais avec l’arrivée du chemin de fer, en 1847, il est devenu un lieu de résidence recherché et une station balnéaire en vogue. Des établissements de bains et un casino y ont même été construits.

Des célébrités s’y sont installées, attirant par ricochet les vacanciers fortunés. Le célèbre parfumeur Pierre Guerlain y a fait construire une grande maison en bord de mer puis, désirant faire connaître la joie des bains de mer à ses amis parisiens, un Grand Hôtel. 

L’écrivain Jules Verne a passé huit ans au Crotoy, où il s’est installé dans une maison “La Solitude”, qui existe toujours. Il y rédigea notamment Vingt mille lieues sous les mers, ce que rappelle une très belle fresque peinte non loin de la maison.

Colette a quant à elle séjourné cinq ans au Crotoy, notamment durant l’été, dans la « villa des Dunes » où elle a écrit deux de ses romans.

Les dégradés de bleus et de gris du Crotoy ont également fasciné les peintres, et pas des moindres. Sisley a séjourné à de nombreuses reprises au Crotoy, Toulouse-Lautrec y a effectué de nombreux séjours, Georges Seurat y a peint deux toiles en 1889… Et Alfred Manessier, “enfant” du Crotoy, y a peint de très nombreuses toiles pendant près de 50 ans.

Jeanne d’Arc a été détenue au Crotoy sur sa route vers Rouen, où elle allait être jugée et exécutée. Il ne reste malheureusement que quelques vestiges de la forteresse où elle fut enfermée, car elle a été détruite en 1674 : les bases d’une tour et quelques pierres des remparts du 12e siècle. Une statue commémore toutefois son passage depuis 1881.

Si vous passez par l’Office du Tourisme du Crotoy, on vous proposera sans doute un plan pour vous permettre de découvrir les jolies villas ou celles qui ont été occupées par des célébrités : l’ancien chalet “Félix-Suzanne-Madeleine” d’un chanteur d’opéra proche d’Offenbach, édifié en 1880 ; la Maison Millevoye, à l’emplacement de l’ancien château, face à la baie ; l’hôtel-restaurant des Tourelles ; l’ancien hôtel de voyageurs, dit “Le Picardy”, construit au début du 20e siècle ; la “Villa Marguerite”, construite entre 1904 et 1907 pour un avocat parisien ; l’ancienne villa de Gustave Lecoq, rue Guerlain, devenue hôtel-restaurant…

L’église Saint-Pierre du Crotoy

L’église Saint-Pierre a été construite à la fin du 19e siècle, après que l’église médiévale originale, délabrée, a été détruite entre 1850 et 1865. Seule la massive tour-clocher en grès du 13e siècle a survécu.

L’édifice actuel est de style néo-gothique, comme c’était souvent le cas à l’époque, et ne possède pas de transept (les “bras” de chaque côté du chœur).

Les jolis vitraux peints du 19e siècle sont classés aux monuments historiques depuis 1980. Vous pouvez, par exemple, dans les bas-côtés, admirer celui représentant le baptême du Christ. 

Ou Sainte Madeleine au tombeau du Christ.

Mais la particularité de l’église Saint-Pierre du Crotoy est qu’elle conserve des ex-voto marins (une offrande faite à un dieu en remerciement). Ils représentent différents types de bateaux du 19e siècle : un navire à coque rouge et noir ; un trois-mâts de guerre ; un trois-mâts barque, navire marchand ; un caïque, navire traditionnel de pêche ; un navire de type brick, voilier à deux mats ; un caïque, petit bateau à voiles.

À l’intérieur, un beau retable en bois du 15e siècle, de style gothique flamboyant, a été placé sous la statue de saint Pierre. Il provient de la Chartreuse de Thuison d’Abbeville, démolie après la Révolution.

L’autel néo-gothique en marbre blanc est, lui aussi, inscrit aux monuments historiques.

Un surprenant retable du 19e siècle, en bois et plâtre, représentant la Vierge dans la grotte de Lourdes a été mis en place à gauche du chœur.

Une peinture murale sur toile marouflée, datant de 1887, représente une “Vue du Crotoy au 15e siècle” avec une citation qu’aurait prononcée Jeanne d’Arc, alors prisonnière au château du Crotoy.

La promenade Manessier

Peintre de renommée internationale, Alfred Manessier a passé sa jeunesse entre Amiens et Abbeville. Peintre de la lumière et de la couleur, il a dédié une grande partie de son œuvre aux sables et galets de la Baie de Somme.

Manessier a régulièrement immortalisé les paysages d’un lieu qu’il considérait comme « l’un des plus beaux du monde », en représentant de manière plus ou moins abstraite des galets, rides de sable, paysages aquatiques, miroitement de l’eau…

La promenade Manessier vous permet de découvrir les sources d’inspiration du peintre le long d’une jolie balade qui se parcourt facilement.

On accède à la promenade par l’écluse du bassin de chasse (suivre la direction “port de plaisance”).
Ce bassin se remplit à marée haute et se vide à marée basse, créant ainsi un courant afin de chasser le sable qui envahit le chenal et le Port du Crotoy.

Depuis le belvédère dédié à sa mémoire, la table d’interprétation du paysage présente une citation du peintre : “Je rêve du Crotoy sans arrêt“. Le belvédère offre aux visiteurs une vue imprenable sur la Baie de Somme, ses vagues, ses courants, ses couleurs, ses reflets.

La promenade Manessier vous conduit sur une langue de terre, avec le bassin sur la gauche et la Baie sur la droite. On se sent seul(e) au monde, au beau milieu de la nature.

La plage du Crotoy

Beaucoup de possibilités s’offrent à vous au Crotoy : balade à pied ou à vélo dans la ville et ses alentours, promenade à cheval dans la Baie, stand-up paddle, kayak ou kitesurf dans l’eau, concours de château de sable ou flânerie sur la plage…
Une seule consigne, renseignez-vous bien sur les horaires de marées : la plage se découvre largement à marée basse, mais la mer remonte très vite à marée haute.

Il est possible de faire une balade en kayak ou une visite guidée à pied, au départ du Crotoy. De nombreux guides nature sont installés au Crotoy et proposent de réaliser des traversées de la Baie de Somme ou la découverte des phoques.

Le cimetière militaire

Jouxtant le cimetière civil, le cimetière militaire du Crotoy accueille des tombes des deux guerres mondiales. Si la plupart des soldats sont français, des Britanniques, un Américain, un Polonais et un Russe y sont également enterrés, ainsi que des victimes civiles et des résistants.

Le lieutenant Edwin Dyett est décédé le 5 janvier 1917. Marin, il avait toutefois été intégré dans le “bataillon Nelson” de la 63e Division, une division d’infanterie à pied formée de réservistes et de volontaires de la Marine. Bien qu’il ait montré des signes de traumatisme psychique lors de la Bataille de la Somme et qu’il ait demandé à quatre reprises d’être rendu à sa fonction de marin, le jeune homme de 21 ans a été reconnu coupable de désertion par une cour martiale. Malgré un appel à la clémence de son propre commandant, il a été fusillé. En 2006, le lieutenant Dyett a été l’un des 300 militaires britanniques à obtenir une grâce posthume.
Le second lieutenant Sydney Cragg, un Australien engagé dans le Royal Flying Corp (l’ancêtre de la RAF), est décédé accidentellement en novembre 1917 à l’âge de 27 ans. L’escadron 25, dont il faisait partie, était basé à Boisdinghem, non loin de Saint-Omer.

Roger Dix, un lieutenant américain, était l’un des élèves de l’école militaire Caudron (les frères Caudron, aviateurs et créateurs d’aéroplanes, avaient créé au Crotoy la première école de pilotage au monde en 1910, doublée d’une école militaire de pilotage en 1913). Décédé accidentellement en mai 1918 au Crotoy, à l’âge de 22 ans, il est considéré “Mort pour la France”.

Mohamed Tahar Zekhinine et Bouzid Semar exerçaient tous les deux le dangereux métier de démineurs sur les plages couvertes de mines par les Allemands sur le “Mur de l’Atlantique”. Ils sont tous les deux décédés en 1945.

Le 11 mars 1943, Tadeusz Stabrowski, un pilote polonais engagé dans la RAF (308e Squadron) était en mission de reconnaissance dans son avion de chasse Spitfire lorsque celui-ci a été touché par la DCA allemande. L’avion s’est écrasé dans la Manche et le corps de Stabrowski, retrouvé sur la plage, a été enterré par les habitants du Crotoy dans une tombe anonyme. Il n’a été identifié qu’en 2017.

J’espère que cet article vous aura donné des idées sur les choses à faire, quoi voir et quoi visiter à Le Crotoy pour une journée ou un week-end.

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4 commentaires

  1. Cyril a dit :

    Merci pour ces intéressantes informations !

    1. Emily a dit :

      Avec plaisir :) Merci pour votre commentaire.

  2. Bravo et merci beaucoup pour votre travail.
    Toujours aussi passionnant car vous apportez des connaissances qui sont précieuses ce qui est assez rare, qui donnent envie de pratiquer un tourisme intelligent et curieux qui ne se limite pas aux attractions Évidentes.

    1. Merci beaucoup ! Votre commentaire me touche, car j’essaie toujours de trouver un petit côté “à part” dans les découvertes que je propose sur le site.

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