Étrange cathédrale que Notre Dame de la Treille. Étrange et contrastée. Une façade très moderne, un édifice néo-gothique, un vitrail flamboyant alors qu’il parait opaque, un portail en bronze parsemé de petits bonzes, de splendides retables et des mosaïques représentant la ville… Partons à la découverte de “La Treille” !
Les visiteurs s’interrogent toujours : pourquoi cette façade moderne sur une église ancienne ? En réalité Notre-Dame de la Treille n’est pas si vieille !
Certes, elle se dresse à l’emplacement de l’ancienne motte féodale des comtes de Flandre, mais ce n’est qu’en 1854 qu’a été posée la première pierre de la future cathédrale de Lille. L’architecte lillois Charles Leroy l’a fait construire dans le style en vogue à l’époque, le néo-gothique (qui imitait le gothique dans le but de faire revivre un Moyen Âge “idéalisé”).
Face aux difficultés rencontrées pour financer les travaux, le chantier de l’église s’est lentement poursuivi durant plus d’un siècle et demi, sous la direction de plusieurs architectes, jusqu’en 1975. Et l’ensemble n’a été achevé qu’en 1999 par l’ajout de la façade moderne.
L’extérieur de la cathédrale
La façade actuelle de la cathédrale est une “peau” de pierre de Soignies agrafée sur une structure métallique. Sa partie centrale est tapissée de 110 panneaux de marbre translucides, blanc à l’extérieur, orangé à l’intérieur, soutenus par une structure métallique. Mais on ne réalise (et on apprécie) réellement cette prouesse architecturale qu’à l’intérieur de l’édifice.
Le portail de 5 mètres de haut, œuvre du sculpteur Georges Jeanclos, frappe par son mélange de tradition et de modernité. Réalisé en verre et en bronze, il représente une treille de ceps de vigne sur laquelle s’accrochent des groupes de dormeurs au crâne rasé ainsi qu’une Vierge qui ouvre les mains.
La cathédrale Notre Dame de la Treille a été construite progressivement d’est en ouest, et l’édifice a bénéficié de l’évolution des techniques sur près de 150 ans. Dans les années 1920, par exemple, on a utilisé de l’acier et du béton. Si les élévations du chœur et des chapelles sont en pierre bleue de Soignies (typique du Nord et de la Belgique), le transept et la nef sont en béton avec un parement extérieur en pierre bleue. On y voit que du feu !
Juste à côté de la cathédrale Notre-Dame de la Treille se dresse une grande tour de briques. Il s’agit du campanile Saint-Nicolas, construit à la hâte pour abriter les cloches données à l’église en juin 1874. Haut de 35 mètres, il abrite le cylindre de ritournelles, le clavier du carillon et les cloches. Il devait n’être que provisoire, mais il a perduré alors que la façade tardait à être construite.
L’intérieur de la cathédrale
La rosace, de 6,5 mètres de diamètre, œuvre de Ladislas Kijno, est constituée de 20 plaques de verre trempé, insérées dans une armature en inox.
Elle surplombe la partie centrale en marbre de la façade qui, comme je vous le disais, est beaucoup plus impressionnante vue de l’intérieur.
En forme de croix latine, l’intérieur de la cathédrale mesure 110 mètres de long sur 54 mètres de large au transept. À son point le plus haut, elle mesure 32 mètres de hauteur.
L’intérieur de la cathédrale donne une impression d’ancienneté rehaussée par quelques touches de modernité. Ainsi, un grand lustre en acier de 10 mètres de haut, inspiré de la Treille, est suspendu au-dessus du chœur.
Le grand orgue (originellement, celui de la maison de la Radio) n’a été installé qu’en 2008.
Tout autour du chœur ont été construites pas moins de sept chapelles ornées de mosaïques, qui ont été posées par le céramiste Louis Coilliot (pour lequel Hector Guimard a créé une célèbre maison Art Nouveau à Lille).
Ces chapelles, élevées à une époque particulière par des notables de la région, présentent des caractéristiques emblématiques de leurs temps et de leurs initiateurs.
La chapelle du Sacré-Cœur de Jésus
Achevée en 1908, la splendide décoration de la chapelle du Sacré-Cœur de Jésus a été réalisée grâce à la souscription publique de 11500 donateurs.
La mosaïque murale représente des hommes, femmes et enfants de tous pays adorant le Christ. On reconnait une Japonaise vêtue de son kimono traditionnel, mais aussi des hommes d’Afrique, du Moyen-Orient, d’Amérique… À la fin du 19ᵉ siècle, la France possédait un vaste empire colonial et, l’air de rien, cette mosaïque vante l’œuvre des missionnaires qui ont transformé les “sauvages” en “bon chrétien”.
La chapelle de Sainte-Anne
Achevée en 1904, la chapelle de sainte Anne, patronne des menuisiers et des couturières, est dédiée au travail et met en scène des corporations et confréries lilloises. 70 corps de métiers sont représentés dans cette chapelle, dont 30 symbolisés par des saints patrons lillois. Les vitraux sont notamment dédiés à saint Arnould (les brasseurs), saint Éloi (la sidérurgie) et saint Nicolas (la filature).
Au centre de l’autel, une mosaïque d’email représente sainte Anne et, au-dessous, une autre mosaïque évoque l’arche de Noé.
Les mosaïques murales figurent quant à elles des saints patrons et des artisans du bâtiment, de l’industrie, de l’alimentation et de l’habillement.
La Sainte-Chapelle
Achevée en 1897, la Sainte Chapelle (dédiée à Marie) est inspirée de la sublime Sainte-Chapelle de Paris.
Les grands vitraux représentent la vie de Marie ainsi que les miracles qui lui sont attribués. Le vitrail du centre est consacré à Notre Dame de la Treille… et en profite pour glorifier ceux qui ont développé son culte (entre autres Monseigneur Sonnois, le Cardinal Régnier et l’abbé Bernard).
L’autel, en bronze doré décoré de pierres précieuses, est surmonté d’une statue moderne de Notre Dame de la Treille (la statue originelle ayant été volée en 1959).
L’allée centrale est recouverte d’une mosaïque singulière représentant les différentes facettes de la cité de Lille : la ville catholique (les églises), la ville littéraire et scientifique (l’université catholique), la ville industrielle et commerciale (les usines).
Les mosaïques murales représentent des épisodes de la Bible (le buisson ardent, l’arche de Noé, l’arche d’alliance, etc.) en alternance avec des figures féminines (Myriam, Eve, Sara, Bethsabée, etc.). Et tout autour, les arcades sont ornées de peintures représentant différentes fleurs (roses, tulipes, violettes, jasmins, lys…).
La chapelle de Jeanne d’Arc
Achevée en 1901, la chapelle de Jeanne d’Arc a été construite alors qu’avaient lieu les débats de son “procès en béatification” (elle n’avait pas encore été canonisée).
Tout comme la chapelle Saint Joseph (voir juste en dessous), elle exprime clairement la volonté d’un rétablissement de la royauté, volonté qui était partagée à cette époque par une majorité des notables lillois.
Les mosaïques murales représentent des rois et reines de France. Le fond bleu est décoré des quinze écus représentant les anciennes provinces de France, du temps de la royauté. L’autel en forme de château fort est orné d’un bas-relief en bronze représentant Louis XIII consacrant le royaume de France à la Vierge en 1638. Au sol, les mosaïques représentent le lys et la couronne royale… N’en jetez plus, on a compris le message !
La chapelle Saint-Joseph
Achevée en 1908, la chapelle de saint Joseph est magnifique. Mais elle est aussi un manifeste royaliste et religieux (la loi de la séparation entre l’état et l’église n’ayant été votée que 3 ans auparavant).
En dessous de Saint-Joseph sont en effet représentés le Pape de l’époque, l’archevêque de Cambrai, le comte de Chambord (petit-fils de Charles X), un professeur à la Faculté de Droit de l’Université catholique, un général, des doyens des cinq facultés catholiques de Lille ainsi que les représentants des principaux secteurs d’activité de la région (commerce, industrie, agriculture, mines et marine).
Accueillant de nombreux touristes, la cathédrale Notre Dame de la Treille propose également des expositions et diverses manifestations culturelles et musicales tout au long de l’année.
Vous pourrez ainsi visiter la crypte semi-enterrée de 2 500 m2, la plus vaste d’Europe. Elle accueille le Centre d’Art Sacré de Lille (ouvert le samedi et le dimanche après-midi) qui présente des œuvres d’artistes internationaux. La crypte abrite par ailleurs les tombes d’évêques lillois, ainsi que 150 « pierres commémoratives » de familles ayant marqué l’histoire de la ville ou de la région dans les domaines de l’industrie, du commerce, de la politique ou de la culture.
INFORMATIONS PRATIQUES
Adresse : Place Gilleson à Lille
Horaires : Ouverte chaque jour de 10h à 18h30 (de 12h à 20h en juillet et août).
Tarif : l’entrée est gratuite. Visites guidées tous les jours de 10h à 18h selon les disponibilités des guides bénévoles.
Contact : 03 20 31 59 12
Puisque vous êtes dans le coin, n’hésitez pas à passer derrière Notre-Dame pour visiter le musée de l’Hospice Comtesse afin d’y découvrir l’histoire de la ville de Lille.
Vous pouvez également remonter jusqu’à l’église désacralisée Sainte Marie-Madeleine et ses surprenantes œuvres modernes. Les églises dans la métropole lilloise sont nombreuses, et la plus anciennes est la collégiale de Seclin.
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