Coups de coeur

A Wallers-en-Fagne, le circuit de la pierre bleue

Wallers-en-Fagne

Wallers-en-Fagne, dans l’Avesnois, est surnommé le village de la pierre bleue. Non seulement toutes ses maisons sont bâties dans cette pierre gris-bleu si caractéristique, mais c’est dans ce village que la pierre bleue est extraite et exploitée, depuis des siècles. Bordé d’une forêt, traversé par une rivière, longé par un étang et entouré de collines boisées, ce petit village de l’Avesnois, proche de la frontière belge, vaut qu’on s’y arrête et que l’on en fasse le tour.

La commune a vu le jour vers le 13e siècle, ses habitants exploitant à la fois le bois des forêts alentour et le calcaire bleu issu du sous-sol. Autrefois, une bonne dizaine de tailleurs de pierre exerçaient leurs talents à Wallers-en-Fagne, le travail de la pierre bleue étant la principale activité économique du village.

D’où vient donc cette « pierre bleue » ? Entre 390 et 360 millions d’années avant notre ère, la mer s’est retirée, laissant un résidu de coquillages sédimentés compressés, du « calcaire givétien », une pierre d’un gris bleutée dont on vante encore aujourd’hui la densité. La veine parcourt cette partie de l’Avesnois, mais aussi les provinces du Hainaut, de Namur et de Liège en Belgique.
Ce calcaire bleu constitue un élément typique des maisons de l’Avesnois et d’une partie des Ardennes.

Le circuit des Monts de Baives et de Wallers en Fagne (2,5km / 50min) commence à l’église de Baives, le village voisin, et passe par la réserve naturelle des Monts de Baives et Wallers-en-Fagne.

Nous allons suivre le circuit de la pierre bleue (4,2km / 1h30), un très agréable parcours jalonné de bornes en pierre bleue valorisant le travail de la pierre, les outils et les techniques de taille. Ce circuit vous guide vers les curiosités locales : l’église Saint-Hilaire, le moulin, les oratoires qui parsèment les chemins, notamment en direction de la réserve naturelle des Monts.

Le départ s’effectue devant l’école de Wallers-en-Fagne, ancien presbytère, à côté de la table d’orientation. Au 19e siècle, Wallers en Fagne possèdait une scierie de marbre et de pierres bleues, une brasserie et un moulin à farine. Ils existent encore, mais ont changé de fonction.

Le circuit de la pierre bleue est jalonné de bornes en pierre sur lesquelles sont vissés des panneaux expliquant l’histoire du village, le travail de la pierre, les spécificités de tel ou tel bâtiment, l’histoire de la pierre bleue dans la région, les outils et techniques des tailleurs de pierre…

Dirigez-vous maintenant vers l’église Saint Hilaire, environ cinquante mètres plus bas sur votre droite.
Elle a été bâtie en 1688, ou du moins c’est ce qu’indique l’inscription qui orne son porche. Sans surprise, elle a été construite en pierre bleue.
Il est possible de visiter l’église en demandant la clé à la mairie (durant les horaires d’ouverture, du lundi au vendredi de 9h à 12h et le samedi matin sur rendez-vous).

La commune possède une relique de saint Hilaire de Poitiers (315-367), un humerus recouvert d’or, de vermeil et d’émaux, ainsi qu’un ostensoir en or serti de pierres précieuses. Mais les deux objets sont bien trop précieux pour être laissés dans l’église et sont protégés dans le coffre d’une banque… Pourquoi une relique du premier évêque de Poitiers s’est-elle retrouvé à Wallers-en-Fagne ? Parce qu’en 1518, Louise, vicomtesse de Limoges, qui avait épousé en 1495 Charles Ier de Croÿ-Chimay, comte de Chimay et d’Avesnes, en a fait don à l’église.

Autour de l’église, vous pouvez voir plusieurs bornes en pierre bleue sculptée qui s’éclairent le nuit venue.

Dirigez-vous sur la gauche de l’église (côté route) et placez-vous sur la dalle en pierre, puis levez les yeux vers le vitrail… Il a été remplacé par une pierre bleue gravée en 2011, représentant les Quatre Saints couronnés, Saints patrons des tailleurs de pierre et des maçons.

Faites maintenant demi-tour, revenez sur vos pas pour rejoindre la façade de l’église. Puis engagez-vous à droite sur la Route de Momignies qui part légèrement en descente.

Une troisième borne supporte un panneau expliquant que vous vous trouvez sur la rive gauche de l’Helpe majeure et la rive droite du canal de la scierie, une dérivation de la riviere destinée à fournir l’energie hydraulique à la scierie anciennement située sur la route de Moustier.

Pour le moment, la carrière est cachée par de grands arbres, mais un panneau explicatif vous en donne les détails.

Vous parvenez dans une clairière où se situe l’ancienne carrière. Cette pierre bleue est un calcaire composée d’éponges, de coraux et de crinoïdes cimentés par de la calcite il y a près de 400 millions d’année !

On distingue le trou d’exploitation d’une carrière manuelle : des coins en bois placés par les tailleurs dans les fissures, arrosés pendant plusieurs jours, séparaient en gonflant les blocs du banc de calcaire. Le banc que vous observez mesure 400 m d’épaisseur et s’enfonce sous le village de Wallers-en-Fagne. Vous pouvez chercher des fossiles et des cristaux dans les blocs…

On distingue, sous les feuillages, le pipe-line de pompage des eaux souterraines de l’exploitation actuelle de la CCM.

Dirigez-vous vers la droite, franchissez le pont au-dessus de l’Helpe Majeure et approchez-vous du moulin.

Jusqu’au 18e siècle, la pierre bleue était sciée manuellement, à raison d’un centimètre par heure. L’utilisation du moulin au 19e siècle a permit d’augmenter le rendement.

À l’origine un moulin à farine, bâti a priori au 16e siècle, le bâtiment accueille désormais les services administratifs de la carrière de pierre bleue.

A côté du moulin, la pierre effleure à nouveau à pleine vue. Ici, elle est recouverte par les schistes et calcaires des « Monts de Baives » (le nom donné à une structure calcaire faisant partie d’une région géologique entre la Fagne et la Thiérache).

Quittez le moulin, prenez la route principale à gauche. Attention, ça monte fort !

Au loin, on aperçoit les grues et les engins de la carrière du « Comptoir des calcaires et matériaux » (CCM) qui exploite une veine depuis 1973. Sur une centaine d’hectares, c’est l’un des dix plus grands gisements de France pour l’extraction de calcaire bleu massif.
Il est possible, grâce à un belvédère, d’observer la carrière, mais j’ai préféré me contenter d’une balade dans la nature… (le belvédère se trouve route de Momignies, en continuant tout droit au lieu de tourner à droite vers le pont et le moulin).

Les haies et bocages sont typiques de l’Avesnois, mais j’ai découvert que le sous-sol calcaire particulier de la Fagne créé des pelouses sèches où poussent nombre de fleurs, dont des orchidées sauvages et d’autres plantes « calcicoles » rares.

Arrivé en haut du chemin du Moulin, vous croisez un joli porche qui, une fois n’est pas coutume, a été construit en briques. Un oratoire en pierre bleue lui fait face.

Au croisement du chemin du Moulin et de la Départementale 83, au lieu dit « Le Chauffour » se dresse la borne n°7, qui explique que ce nom rappelle l’implantation d’un four à chaux. La chaux était nécessaire pour amender les terres, désinfecter les étables et les habitations, et améliorer les mortiers à base d’argile.
Pour obtenir de la chaux, on chauffait du bois et du calcaire, ce que les habitants de Wallers-en-Fagne avaient à foison.

Au croisement, tournez à gauche puis virez à droite sur Chemin du Cheneau qui descend légèrement à présent.

Vous allez croiser la borne n°8 au lieu dit « Le Tireux Quézot », qui vous invite à admirer le panorama.

Continuez sur la route jusqu’à l’oratoire. Wallers-en-Fagne compte plusieurs chapelles et oratoires, comme celui-ci, datant de 1777-1779, au coin du Chemin du Milieu et du Chemin du Cheneau.

Prenez le chemin de droite pour redescendre vers le village.

Une neuvième borne est plantée sur la rue de la Haut, qui souligne le visage du village, construit en pierre bleue le long d’une seule grande rue.

On l’appelle toujours la Chapelle aux tilleuls, même s’il n’y a plus de tilleuls aux alentours. Le bâtiment a été érigé en 1613 en brique rouge et en pierre bleue au coin du Chemin du Fief et de la rue de la Haut.

En avançant dans le village, on réalise que l’originalité de Wallers-en-Fagne réside dans l’architecture de ses maisons : elles sont toutes construites en « pierres bleues », très résistantes au gel et à l’érosion. La roche se marie harmonieusement aux ardoises de Fumay, qui recouvrent les toitures.

L’ancienne forge se dresse encore, toute de pierre bleue vêtue. C’est là qu’étaient forgé les outils des tailleurs de pierre et les ancres des bâtiments.

Juste à côté, le centre artisanal de la Pierre Bleue de Wallers-en-Fagne est installé dans une grange du 18ème siècle, depuis 2002. Il accueille les ateliers de tailleurs de pierre (en ce moment Johann Leleux, tailleur sculpteur) qui réalisent des sculptures d’ornement, mais aussi des parements muraux, plans de travail, éviers, bordures, appuis de fenêtre, bornes, marches d’escaliers… La pierre bleue sert à tout !

Passez le Centre et continuez tout droit sur quelques centaines de mètres jusqu’à la treizième borne qui invite à observer les portes des bâtiments alentours. Elles possèdent des montants et linteaux qui montrent le savoir-faire des artisans de la pierre… mais aussi le degré de richesse des propriétaires qui ont passé commande.

De nombreuses sculptures et gravures sont disséminées dans le village. En tournant à gauche, vous pouvez admirer (au 6, Rue des Brimbées) cette niche dédiée à Sainte Hiltrude, particulièrement vénérée dans l’Avesnois.

Vous traversez un lotissement de maisons modernes (en briques, mais avec des touches de pierre bleue) jusqu’à un croisement où se dresse une sculpture contemporaine. Tournez ici à droite.

Vous êtes sur la Promenade de la Folie. Rien de bien « fou », mais une jolie promenade dans un bois 😉

Au bout du chemin, une nouvelle borne situe une petite carrière remblayée d’où l’on extrayait auparavant l’argile, qui servait de mortier, pour la fabrication des briques ou l’isolation des combles.
Tournez à droite et traversez à nouveau des prairies pour parvenir jusqu’à la Place des Trieux.

La place des Trieux accueille deux bornes. La première présente l’atelier de sculpture de Fredy Taminiaux, également poète et conteur, qui réalise des oeuvres à partir de blocs de plusieurs tonnes de granit ou de marbre. La seconde borne est consacrée aux « fermes blocs » du village, toutes linéaires et souvent à un seul étage.

Quittez la place et reprenez votre route pour revenir vers l’église du village.

A l’intersection, tournez à droite sur la route de Moustier pour retrouvez l’église.

Une dernière borne rappelle que Wallers-en-Fagne a été un village vivant et quasi industriel, du 17e au 19e siècle.

Chaque année, début mai, Wallers-en-Fagne organise la « Fête de la pierre bleue » où il vous est possible de participer à une randonnée ou une balade bucolique, de profiter d’une brocante et de visiter des expositions, d’admirer des démonstrations de taille de pierre ou de participer à une présentation de la carrière CCM.

La gare la plus proche se trouve à Fourmies, à une douzaine de kilomètres, et dessert les lignes Lille-Hirson et Maubeuge-Fourmies.

Puisque vous êtes dans le coin, vous pouvez visiter le château de Trélon, demeure des princes de Mérode. Vous pouvez aussi passer un week-end entre Trélon et Fourmies, au riche patrimoine industriel. Et vous pouvez même lire les autres articles consacrés à l’Avesnois, région que j’apprécie particulièrement 😉

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